Tricot thérapie

Les tricoteuses et les tricoteurs vont le diront : ils se sentent plus heureux, de meilleure humeur et moins stressés après avoir passé un moment à tricoter.

Et oui, il semblerait que les bienfaits du tricot soient similaires à ceux de la méditation. En effet, se concentrer sur un mouvement que l’on répète encore et encore procure un sentiment de relaxation et permet de se détendre. De plus, cette activité qui demande donc beaucoup de concentration nous empêche de trop penser à nos problèmes.

Il paraît que tricoter fait aussi du bien à notre cerveau. Il se dit même que cela aiderait peut-être à réduire la perte de mémoire de 30 à 50 % chez les personnes âgées. Espérons qu’il en sera de même avec celles et ceux qui souffrent du « cerveau-chimio ». Il a été montré que, pour effectuer des mouvements rapides et soignés, le tricot stimule les connexions neuronales de notre cerveau, leur permettant de rester intactes plus longtemps.

Il semble aussi que tricoter peut réactiver des sensations tactiles oubliées, améliorer notre agilité et retarder l’apparition de l’arthrite. Du fait que les mains sont sans cesse mobilisées, on devient plus agile et on fait du bien à nos articulations. On force le fluide à circuler autour de notre cartilage et ça permet d’hydrater les articulations. Par conséquent, cela réduit le risque d’apparition de l’arthrite et peut même soulager la douleur si on tricote au moins une heure par jour.

Et il ne faut pas croire que cette activité soit réservée aux manuels. Tout le monde peut s’y mettre. Il y a tout de même une condition : il faut pouvoir dégager du temps. On ne tricote pas pour une session de 3 minutes. Il faut avoir au moins 15 minutes devant soi.

Et le tricot peut se pratiquer à plusieurs. S’il permet de se vider l’esprit et de se déstresser quand on tricote seul, c’est aussi un moment agréable à passer avec d’autres tricoteuses et tricoteurs. C’est bien plus sympathique de tricoter en groupe autour d’une boisson chaude ou d’un goûter. Cela devient alors une activité génératrice de lien.

Et puis, cela peut améliorer l’estime de soi. Quelle grande source de fierté et d’accomplissement de pouvoir dire « c’est moi qui l’ai fait !». C’est gratifiant.

Alors c’est pourquoi les membres du groupe de parole « Cancer, Vivre avec toi, Vivre après toi » ont décidé de se lancer. Les débutantes et les expérimentées, les expertes et les maladroites, toutes à nos aiguilles sous l’œil avisé et expert de Colette, membre fidèle du groupe et notre coach pour cette activité.

Et 9 mois ont passé

Et bien oui, cela fait 9 mois que je n’ai rien posté sur mon blog. Le temps qu’il faut pour créer et mettre au monde un petit bout de femme, ou d’homme. Et cette comparaison est assez bienvenue car durant ces longs mois je n’ai pas été inactive, loin de là. C’est même plutôt une nouvelle vie qui a commencé pour moi. En entrant dans le club des sexagénaires, j’ai enfin découvert ce que je voulais faire de ma vie. Aider les autres, les écouter, les accompagner dans les moments difficiles de leur vie.

Et comme il n’y a pas de hasard, mais que des rencontres, c’est au mois de septembre 2018 que j’ai fait la connaissance, lors du forum des associations de ma ville de Chilly-Mazarin, des membres de l’association KiFéKoi.

J’avais le projet de créer un groupe de parole pour les personnes atteintes du cancer et leurs proches et je cherchais une association qui pourrait intégrer ce groupe dans ses activités.

Alors, pourquoi KiFéKoi ? Tout simplement parce qu’à leur stand j’ai vu une personne que je connaissais, Marion, à qui j’avais donné des cours d’anglais à domicile dans une autre vie.

Nous avons discuté, elle m’a proposé de rencontrer la présidente de l’association et tout a commencé.

Nous avons créé un groupe pilote, Adeline la présidente, Anaïs dont la maman est décédée d’un cancer du sein, Hélène, médecin, et Flora, directrice de centre de PMI à la retraite. Et nous avons travaillé sur notre projet, nous l’avons peaufiné. Nous sommes passées par des périodes d’enthousiasme et de doutes et, enfin, au mois de janvier de cette année, nous nous sommes lancées.

Nous avions décidé d’organiser une réunion par semaine, le vendredi après-midi de 14h à 15h30, à mon domicile pour commencer car les locaux de l’association étaient en travaux.

Le premier vendredi, nous étions prêtes, Anaïs, Flora et moi, à animer notre première réunion. Nous avions posté nos affiches chez les commerçants de la ville, nous avions communiqué sur les réseaux sociaux. Et nous étions sûres que personne ne viendrait ! Et pourtant, ce jour-là, six personnes étaient au rendez-vous. Certaines sont venues de loin pour participer. Le besoin de se retrouver ensemble, de partager nos galères, nos joies et nos problèmes était vital pour toutes. L’important était de se retrouver en dehors de l’hôpital, entre nous et avec ceux de nos proches qui souhaitaient participer.

Le rôle d’animatrice ne s’improvise pas. C’est pourquoi nous avons fait appel à Marie-Pierre, formatrice, entre autres, aux métiers de l’animation. Grâce à elle, nous avons acquis des connaissances qui nous ont permis de remplir au mieux notre rôle.

Et grâce aux relations des unes et des autres, nous avons eu le plaisir d’accueillir des intervenantes qui, à titre gracieux, sont venues nous parler de leur activité. Christine, sophrologue, Patricia, réflexologue, Magali, diététicienne et Céline, hypnothérapeute.

Nous avons fait un atelier de scrapbooking avec Marie-Thérèse, une séance photo avec Alain et une initiation au Taï Chi avec Sergine.

Et nous avons plein d’idées d’activités pour la rentrée de septembre.

Et nous voilà aujourd’hui, à la veille des grandes vacances. Notre groupe compte maintenant une quinzaine de participantes (+ un monsieur!) et nous sommes devenues une grande famille. Avec ses hauts et ses bas, ses bons moments et ses grosses galères.
Et moi, pour la première fois de ma vie, à maintenant 61 ans, je me suis découvert des amies, des vraies amies, à moi. Et j’ai trouvé un sens à ma vie. Il n’est jamais trop tard pour ça. Ce que je souhaite c’est être à l’écoute des autres, les aider, les soutenir, les aimer.

Et c’est ce que je fais maintenant et je suis sereine, en accord avec moi-même et c’est la plus belle des choses qui pouvait m’arriver.

Allez, je vais essayer de ne pas attendre aussi longtemps pour écrire de nouveau sur mon blog.

Je vous laisse. Surtout faites bien attention à vous. À très bientôt !

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Tabou ! Mais quel tabou ?

Je dois vous avouer que je me suis pas mal énervée ce matin en lisant la une du Parisien affichée sur la devanture de mon supermarché : « Jean-Pierre Pernaut brise un tabou ». Ah oui, lequel ? J’ai bien une petite idée …

Etant donné que je suis abonnée au journal, je rentre chez moi et je me précipite sur la page 29. Et là, en gros titre est écrit « Jean-Pierre Pernault ne cache pas son cancer ». Ben, il ne manquerait plus que ça, qu’il cache son cancer !

Cancer de la prostate, d’accord. Depuis quand c’est une maladie honteuse qu’on doit cacher ? Est-ce qu’on s’imagine que, parce qu’il passe à la télé, il ne devrait pas avoir de cancer ?

Mais on vit dans quel siècle. Dans las années 1990, mon grand-père est mort d’un cancer du rectum et, à l’époque, ce mot faisait peur, on n’osait pas le prononcer. Mais en 2018, qu’on parle encore de tabou, ça me met en colère. Comme le fait, d’ailleurs, de dire qu’untel est mort des suites d’une « longue maladie ».

Comment peut-on encore véhiculer des idées pareilles ?

Oui, je suis en colère. J’ai un cancer du sein métastatique, qui ne guérira pas et je vis avec. Et je ne brise pas un tabou à chaque fois que j’en parle. Je suis malade chronique. J’ai pas fait exprès d’avoir un cancer. Pourquoi je « briserai un tabou » à chaque fois que j’en parle. Et croyez-moi, j’en parle. À tel point que je vais créer un groupe de parole dans ma lointaine banlieue . Et dans ce groupe, je souhaite que non seulement les patients et leurs proches participent, mais aussi toutes les personnes « valides » que le sujet intéresse.

J’espère ainsi, modestement, faire évoluer les mentalités et que plus jamais, pour le cancer et pour toutes les autres maladies, on parle de « tabou».

Voilà, c’était mon humeur du jour. Parlez-en, commentez, mettez-vous en colère pour que les choses changent.

Allez, je vous laisse. À bientôt et surtout prenez soin de vous.

Petit passage à vide

Oui, oui, je suis toujours là. Non, non, je ne vous ai pas oublié(e)s.

C’est juste que je suis

fatiguée blog

Ce ne sont pas les idées de sujets qui me manquent, c’est juste le courage. Attention, je n’ai pas été inactive. Au contraire, j’ai peut-être été trop active, tout au moins par rapport à mes capacités.

Récapitulons, que s’est-il passé depuis le mois de juin ? Tout d’abord, tout le monde l’aura remarqué, il a fait chaud, très chaud. Et ça, avec ma déshydratation permanente, m’a bien fatiguée. Malgré des perfusions de sérum physiologique plus fréquentes, j’ai eu du mal à conserver mon poids. Et puis tout l’organisme a bien morflé. Physiquement c’était dur et au niveau intellectuel j’ai eu l’impression que mon cerveau avait mis la clé sous la porte. Et oui, la déshydratation agit aussi sur le cerveau ! Il fonctionne au ralenti. Et quand on a déjà des problèmes de mémorisation et de concentration à cause des traitements, bonjour la galère !

A part ça, je continue à travailler sur mon projet de groupe de parole. C’est compliqué. Pour bien faire il faudrait créer une association mais je ne m’en sens pas capable. C’est déprimant d’avoir des projets et de se sentir incapable de les concrétiser.

Je crois qu’il faut accepter certaines choses. Quand je me réveille le matin, je suis pleine d’enthousiasme, je me sens prête à abattre des montagnes. Mais j’essaie de ne pas prévoir trop d’activités dans mon emploi du temps car je sais que je ne pourrai pas tout faire et que je serai frustrée.

Donc, j’ai fait une liste de ce que je prévois de faire. Rien n’est vraiment urgent et j’avance à petits pas. Ce que je n’ai pas fait sera fait demain, ou après-demain, ou pas … C’est difficile d’accepter qu’on n’est plus capable de faire ce qu’on faisait avant. Mais c’est comme ça, on n’est plus comme avant. Il faut revoir sa façon de vivre, réinventer son quotidien.

Il faut aussi s’affranchir du regard des autres. «Mais ça y est, vous êtes guérie, vous avez une mine splendide ! Ça va mieux, non ? ». Ben non, je ne suis pas guérie. Mais oui, ça va mieux car, petit à petit, je me réconcilie avec moi-même. J’apprends à aimer celle que je suis devenue. À accepter mes faiblesses, à accepter mes limites. J’ai envie de me balader à Paris, mais je sais que, pour l’instant, je ne peux pas affronter les trajets en transports en commun. Tant pis, j’attendrai d’être plus courageuse.

Mais quand même, j’ai fait des choses. Tout d’abord, je continue à travailler sur la conception du classeur du patient avec la responsable du 3C Sud Ile de France. Ça me plaît. C’est passionnant. C’est bénévole, me direz-vous. Oui, mais tant pis. Ça me donne de l’expérience.

Samedi dernier, je suis allée voir l’exposition Klimt à l’Atelier des Lumières, avec mon fils, Alexandre, et son amie, Dorine. C’était le cadeau d’anniversaire que mes infirmières, qui sont devenues mes amies, m’ont offert pour mes 60 ans. C’était magique ! Ensuite, nous sommes allés manger chez Ober Mamma, une trattoria du 11ème arrondissement. J’étais un peu fatiguée mais c’était une super journée. Et puis, Paris au mois d’août, c’est une sacrée expérience. Il n’y a pas grand-monde, on peut se garer où on veut. On n’est pas bousculé.

Demain, je vais au Jardin d’Acclimatation avec mon fils, Ivan, sa femme, Claire, et mon petit-fils Milo. Ce lieu, c’est une tradition familiale : ma maman y allait quand elle était petite, mes grand-parents m’y ont emmenée, mes enfants y sont allés avec leurs grand-parents et voilà que je reprends le flambeau ! Ça devrait être une belle journée.

Et puis, après 17 mois d’attente (oui, 17 mois!), je viens de recevoir ma Reconnaissance de Qualité de Travailleur Handicapé (RQTH) de la Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) de l’Essonne. C’est pas trop tôt ! À quoi ça sert, allez-vous me demander ? D’une part, j’obtiens aussi la carte de priorité, et d’autre part, ça me permet de bénéficier de certaines aides spécifiques de la branche « travailleurs handicapés » de Pôle Emploi. En quoi cela consiste ? Je ne sais pas pour l’instant. À découvrir.

J’ai aussi postulé pour un poste de patient partenaire à la Faculté de médecine de l’Université Paris-Est Créteil. Je n’ai pas beaucoup d’espoir d’être acceptée. Mais je me dis que l’idée du patient expert s’impose de plus en plus dans le monde médical et c’est une bonne nouvelle.

Je suis prête à partager mon expérience de la maladie. Je le fais déjà avec la conception du classeur du patient et j’aime ça.

Bon, ben c’était bien de faire un peu le point sur ma vie. C’est plutôt positif. Ça me montre que j’ai encore plein de choses à faire. À mon rythme ! Avec ma fatigue, ma maladie, mes traitements. C’est jouable.

Allez, je vous laisse. Bonne journée à vous. Et surtout, prenez soin de vous !

Bénévole … ou pas ?

Je dois dire que je me pose cette question depuis un certain temps.

Nous en avons beaucoup discuté à l’Université des Patients et le moins qu’on puisse dire c’est que les avis sont plutôt contrastés.

Bien sûr, notre diplôme de « Mission d’accompagnant de parcours du patient en cancérologie » nous donne une légitimité et doit nous permettre de prétendre à une rémunération.

Mais, bien que la notion de « patient-expert » soit maintenant reconnue, ce n’est pas encore un métier. Et il nous reste à faire nos preuves.

J’ai commencé à contacter des employeurs potentiels, par courriel, pour proposer ma « collaboration » à l’élaboration de documents d’information pour les patients. Je leur ai aussi proposé de partager mes connaissances et mon expertise avec d’autres malades lors de réunions ou de colloques. Bon, franchement, jusqu’à présent, je n’ai eu aucune réponse.

Par contre, la responsable 3C de l’hôpital où j’ai effectué mon stage m’a sollicitée pour participer à la refonte du classeur d’information du patient. Et ça, ça m’intéresse. Seulement, c’est sur la base du bénévolat. Mais j’ai accepté.

Mes infirmières de ville m’ont aussi demandé si je pouvais aider certains de leurs patients qui ont du mal à gérer leur maladie. Je leur ai dit que c’était mon rôle de « patient expert ». Mais je ne peux pas envisager de réclamer de l’argent à ces personnes.

Car la question est de savoir si j’attends une offre d’emploi rémunéré qui n’arrivera peut-être jamais ou si je me lance dans le bénévolat. Il est peut-être nécessaire pour moi de faire mes preuves, d’étoffer mon expérience, pour pouvoir ensuite prétendre à un emploi rémunéré. Ou pas … De toute façon, je ne peux pas rester sans rien faire. Je m’étiole.

Et puis, au fond de moi, j’ai plutôt l’âme d’un bon samaritain et ça ne me gêne pas de faire ce que j’aime et qui me passionne sans être payée.

J’entends déjà celles et ceux qui vont réagir à mes propos : « mais non, tu as un diplôme, tu dois être rémunérée ! ».

C’est vrai. Mais moi, je veux aider les autres à traverser cette période difficile. C’est ça mon but. Alors, si c’est pas payé, ben tant pis ! Je le ferai quand même.

Bon, par contre, je ne sais pas si Pôle Emploi va apprécier. Mais à 60 ans, avec un cancer métastatique, une stomie digestive, un traitement aux effets secondaires invalidants et une hydratation quasi quotidienne par perfusion, je ne vois pas trop qui voudrait m’embaucher.

Ça m’a fait du bien d’écrire tout ça. C’est peut-être un peu décousu mais ça m’a permis de clarifier mes idées. Et je suis sûre de ne pas être la seule à me poser la question.

Allez, je vous laisse. À bientôt. Et surtout, prenez soin de vous !

Métavivante

Ce mot est la traduction du mot anglais « metavivor », contraction des mots « metastasis » et « survivor ». Parce que, oui, on peut vivre, et même survivre, avec un cancer métastatique.

Dans le tiercé gagnant, après cancer et chimiothérapie, métastase est le troisième mot qui fait peur. Mais, comme les deux premiers, on finit par s’y habituer, par le comprendre, le dompter.

Je parle de ce que je connais, c’est à dire du cancer métastatique du sein.

Je ne prétends pas expliquer ce que sont les métastases, ni la façon dont elles se propagent. La Fondation ARC a édité une petite brochure explicative à ce sujet, simple à comprendre, à consulter et à télécharger sur son site.

J’aimerais plutôt partager mon ressenti, les difficultés au quotidien, mais aussi l’espoir que j’ai de vivre encore très longtemps avec cette maladie.

Cancer métastatique, maladie chronique ? C’est ainsi que je le vis. Car il faut se rendre à l’évidence : je suis malade …. à vie. Dans l’état actuel de la recherche, ce type de cancer est pour l’instant incurable.

Alors, ça veut dire quoi ?

Ça veut dire que l’on peut traiter le cancer métastatique et permettre aux patientes de vivre un certain nombre d’années, avec une qualité de vie aussi bonne que possible. Notre quotidien peut sembler presque normal mais le problème est que notre vie est dominée par la réalité de la maladie, par les traitements que nous recevons, par les effets secondaires et par les examens que nous passons régulièrement pour en surveiller la progression. Car, la plupart du temps, les médicaments ont une durée d’efficacité limitée. Il faut donc toujours ajuster les traitements.

Et puis, avouons-le, nous nous sentons un peu invisibles. Durant Octobre Rose, on parle beaucoup de dépistage précoce, de mammographie, de traitements et de guérison. On oublie le cancer métastatique, comme si c’était une maladie honteuse qu’il faut cacher.

Quand on pense à nous, c’est pour nous considérer comme celles qui ont perdu la bataille, qui sont en fin de vie. C’est comme si on avait échoué.

Et ainsi, notre expérience de vie et nos attentes sont mal perçues. Si vous me croisez dans la rue, vous ne penserez pas que je suis malade. Ma vie ressemble à la vôtre. Mais, de cure en cure, de prise de sang en prise de sang, de Petscan en Petscan, cet équilibre précaire entre stabilité et rechute peut toujours basculer. Je le sais et je le vis, sans trop penser à ce que demain sera. En me disant qu’il faut toujours profiter du moment présent. Après, on verra.

Et oui, après tout, je suis toujours une guerrière. La lutte est mon quotidien et, pour l’instant, je m’en sors pas mal.

Allez, je vous laisse. À bientôt. Et surtout, prenez soin de vous !

Voilà, c’est fini

Et oui, l’année universitaire 2017-2018 du D.U. « mission d’accompagnant du patient en parcours de cancérologie » est finie. La remise des diplômes a eu lieu vendredi dernier.

Ce fut une année riche. Par l’enseignement bien sûr mais aussi, et surtout, par toutes ces rencontres avec des personnes si différentes de moi, et si semblables aussi, avec cette maladie qui nous lie tous.

Le temps a été trop court pour faire vraiment connaissance mais les deux derniers jours de cours ont été d’une immense intensité. Isabelle, notre responsable pédagogique, a demandé à chacun son ressenti sur cette année d’enseignement . Et je peux vous dire que j’ai été submergée par l’émotion. J’en ai appris plus sur mes collègues du D.U. durant ces deux jours de « débriefing » que pendant toute l’année scolaire.

J’ai le sentiment que beaucoup d’entre nous se sont mis à nu durant ces deux derniers jours. J’ai l’impression d’avoir entendu les doutes, les espoirs, les déceptions et les peurs aussi, d’avoir compris combien il avait été difficile pour certaines de se sentir acceptées.

J’ai surtout réalisé que notre vulnérabilité est notre force. De notre maladie nous avons fait une arme qui nous permettra d’avancer dans la vie et d’aider, chacune et chacun à sa façon, ceux qui sont malades.

J’espère de tout mon coeur que nous ne nous perdrons pas de vue. Je sais qu’il est quelquefois difficile de garder le contact, d’autant plus que nous sommes éparpillés aux quatre coins de la France. Mais je sais aussi que, grâce aux liens que nous avons tissés, nous serons toujours proches les uns des autres.

Alors, non, ce n’est pas fini. C’est juste un chapitre du livre de notre vie qui se termine. Nous tournons une page et les prochaines seront riches de nos projets et de leur réalisation.

Encore une fois, merci à toutes et à tous qui ont fait un bout de chemin avec moi : la formidable équipe pédagogique et les autres élèves, mes collègues qui, je l’espère, sont devenus mes amis.

Bonne route à toutes et à tous et à bientôt, j’en suis sûre !

Un grand vide

C’est ce que j’ai ressenti le 29 avril quand j’ai cliqué sur le bouton « envoi » et que mon travail personnel pour le D.U. a été envoyé.

Et je me suis dit « qu’est-ce que je vais faire maintenant ? ». Après toute cette pression, toute cette urgence, tout ce travail, plus rien. Et pourtant je l’attendais ce moment. Tous les matins, après avoir travaillé sur la rédaction du projet, je me disais « vivement que j’ai fini, que je me repose. ». Oui mais, maintenant, que va-t-il se passer ?

Bien sûr, il y a encore la soutenance orale du projet commun à peaufiner, mais ce n’est pas pareil. Ce n’est pas mon travail à moi toute seule. De plus, ça ne correspond pas vraiment à ce que je voulais faire.

Et pourtant, en y réfléchissant, j’en ai éprouvé des doutes sur ce projet personnel. J’ai bien cru ne pas réussir à le mener à son terme. Il faut dire que je n’ai pas fait d’études supérieures et ça n’était pas évident d’élaborer un travail universitaire . En plus, mon manque d’organisation m’a beaucoup desservie. Et puis, mon plus grand ennemi, mon manque de confiance en moi, ne m’a pas aidée.

Mais ça y est, j’ai réussi et je me suis prise au jeu. Peut-être n’ai-je pas vraiment respecté les consignes. Peut-être suis-je hors-sujet. Ce qui est sûr c’est que cela m’a permis d’y voir plus clair au sujet de ce que je voudrais faire après le diplôme.

Je pensais être faite pour le contact avec le patient, que mon empathie me permettrait de le soutenir, le guider, le conseiller. Mais en fait, ce qui me plaît vraiment c’est plutôt le travail en « amont », avec les soignants. Les aider à comprendre le vécu et les besoins des malades, à élaborer de la documentation utile, chercher des pistes pour améliorer le quotidien des patients. C’est ça qui me plaît.

Cette idée a germé durant mon stage au C.S. de Bligny. J’y ai effectué un stage d’immersion complet car j’ai eu l’occasion de passer du temps dans chaque service du pôle oncologie, avec les soignants et les patients. Ce fut une belle expérience.

« Il n’y a pas de hasard », m’a dit un jour ma sophrologue. Et elle a raison. Il y a des circonstances, des évènements qui guident notre vie, qui nous font faire des choix. Et il y a des rencontres.

C’est ma sophrologue, Christine, qui m’a tant aidée quand j’étais au plus mal, qui m’a parlé il y a un an et demi de patient partenaire. C’est grâce à elle que j’ai fait des recherches sur internet et que j’ai découvert l’Université de Patients, fondée par Catherine Tourette-Turgis. C’est elle aussi qui m’a poussée à poser ma candidature et qui m’a soutenue dans les moments de doute.

Ma rencontre avec l’équipe de l’Université des Patients et avec les autres élèves du D.U. a aussi été déterminante. La bienveillance et la chaleur humaine ont été constamment là, durant toute l’année scolaire. J’ai peu à peu repris confiance en moi, je me suis sentie reconnue et appréciée. Bon, il y a encore du chemin à faire pour arriver au rétablissement complet, mais je progresse.

Et puis, un peu par hasard (oui, quand même, il y en a un peu, du hasard), il y a eu ma rencontre avec le directeur médical du C.H. de Bligny et la responsable du 3C. Ils ont été intéressés par ma demande de stage. Nous avons eu un entretien. Ils m’ont conseillé un sujet de mémoire et ont accepté que j’effectue mon stage dans leur établissement.

Et je les en remercie de tout coeur. Grâce à eux, j’ai pu suivre le parcours du patient étape par étape. J’ai eu la chance d’assister à des réunions auxquelles les patients ne sont jamais conviés. J’ai eu l’occasion de discuter avec des médecins, des infirmières et des patients. Je suis passée de l’autre côté du miroir. J’ai été accueillie par tous avec gentillesse et bienveillance.

Maintenant, il me reste à réfléchir sur ce que je veux faire des savoirs que j’ai acquis et des expériences que j’ai vécues.

En toute franchise, pour l’instant, je ne sais pas comment transformer mon expérience en expertise. Je ne sais pas si je pourrai m’intégrer dans une équipe, dans un service. Je dois maintenant prouver que mes connaissances peuvent être utiles à l’amélioration du parcours du patient en cancérologie.

Je vais relire tranquillement mes cours de l’Université des Patients. Ceux-ci m’ont beaucoup aidée à comprendre la cancérologie et le monde médical. Mais je dois avouer que j’ai quelquefois été « larguée » par certains sujets. J’ai eu beaucoup de mal avec la philosophie et la démocratie sanitaire ! Un peu trop ardus pour mon petit cerveau !

Mais tous les intervenants ont été captivants et le temps a passé trop vite.

J’ai été tentée par le D.U. d’éducation thérapeutique du patient. Mais je pense que je ne pourrai pas, pour l’instant, m’inscrire à ce diplôme. J’ai peur de ne pas y arriver. Ce n’est pas évident de concilier études, traitement de la maladie et vie quotidienne. Mais ça reste une option pour un peu plus tard.

Pour conclure, je ne regrette pas d’avoir fait cette année scolaire. Ce fut une expérience extraordinaire pour moi. Et puis, j’ai « kiffé » de pouvoir enfin dire, à l’aube de mes 60 ans, que j’étais étudiante à la fac !

Allez, je vous laisse. Portez-vous bien !

À bientôt.

Mon quotidien

méditer blog

Il m’est quelquefois difficile de verbaliser mes sentiments, mon ressenti.

C’est beaucoup plus facile à l’écrit.

Alors voilà, je me lance !

Comme vous le savez, je suis inscrite cette année à l’Université des Patients, au diplôme universitaire « mission d’accompagnant du patient en parcours de cancérologie ». Deux jours de cours par mois et un gros travail personnel à la maison pour concocter un projet d’ingénierie sur l’implantation des patients dans le parcours de soins. De plus, en sous-groupes de 5 ou 6 étudiants, nous devons constituer une mallette qui nous servira plus tard quand nous endosserons le rôle de « patient partenaire ».

Mais, me direz-vous, quel rapport avec ton quotidien ? J’y viens.

Les collègues de mon groupe, Carole, Catherine, Sandrine et Virginie, se proposent de passer un week-end prolongé en Normandie pour travailler sur la soutenance, qui se tiendra mi-mai, de notre projet.

Et je me rends compte que je ne peux pas les accompagner. Et pourquoi ? Parce que mon quotidien est compliqué. Je m’y suis habituée, mais c’est compliqué ….

Tout d’abord, j’ai une iléostomie. Cela veut dire qu’une partie de mon intestin grêle, l’iléon, est amenée à la surface de mon abdomen pour former une stomie. Cela permet l’évacuation des selles et de laisser mon côlon au repos.

Et cela implique beaucoup de contraintes car cette stomie est proche de l’estomac et les selles s’évacuent très, très vite ! Repas-vidange en 15 minutes chrono ! Ce qui signifie qu’il ne vaut mieux pas s’éloigner des toilettes car une poche de stomie a une capacité d’environ 500 ml mais il est plus prudent de la vider quand elle est à moitié pleine, sinon on risque la fuite. Et la fuite de selles liquides, c’est pas cool !

Donc, vidange environ 20 fois par jour, pour moi en tout cas. Pour éviter de me lever la nuit, je me couche tard et je me lève tôt. Je vous entends déjà me poser la question « mais pourquoi tu n’utilises pas des poches d’une plus grande capacité ? ». J’aimerais bien vous y voir, vous trimbaler avec un kilo de caca pendouillant sur votre ventre. Parce qu’en plus, c’est pas pratique de s’habiller avec la poche. On peut la rentrer dans le pantalon, mais quand elle est pleine, ça gène. On peut la laisser à l’extérieur du pantalon, mais quand elle est pleine, ça ballotte. Et ça, ce n’est que le premier problème.

Parce qu’en plus, la poche, il faut la changer tous les jours. Et il est recommandé de la changer quand on a rien dans l’estomac. Sinon, bonjour les dégâts. Donc, tous les matins, vers 4h30 (oui, je sais, c’est tôt mais c’est l’heure limite avant l’explosion de la dite poche) je m’installe tranquillement dans la salle de bain et je procède à la toilette de ma stomie et à la pose d’une nouvelle poche. L’hygiène de la stomie est primordiale. Il vous faut penser que les selles qui proviennent de l’estomac sont d’une part liquides et d’autre part particulièrement corrosives. La peau autour de la stomie doit donc être parfaitement nettoyée et protégée avant de poser la nouvelle poche. Vous ne pouvez pas échapper à ce rituel, pas un seul jour de votre vie. Vous savez qu’il y a de grandes chances que ce soit définitif, que vous ne puissiez plus jamais laisser cette petite partie de votre ventre respirer à son aise.

Et puis selles liquides impliquent aussi déshydratation et dénutrition. Ben oui, le corps n’a pas le temps d’assimiler la nourriture, elle passe trop vite. L’avantage, c’est qu’on n’a pas besoin de faire de régime. L’inconvénient c’est qu’on maigrit rapidement, très rapidement, trop rapidement.

J’ai été sous alimentation parentérale (par perfusion) pendant 2 ans, pour reprendre les 17 kilos que j’avais perdus. Comme j’ai bien repris du poids, je suis maintenant uniquement sous hydratation. Quatre soirs par semaine (ou plus, si le besoin s’en fait sentir), mon infirmière passe à la maison et installe la perfusion de sérum physiologique agrémenté de quelques nutriments. Cela dure toute la nuit et, le lendemain matin, elle vient débrancher la perf et me laisse tranquille jusqu’au soir. Autant vous dire que, pour avoir une vie sociale, c’est un peu compliqué.

Et puis, cerise sur le gâteau, j’ai la chance d’avoir un cancer du sein métastatique ! Et oui, je les accumule. Ce charmant compagnon de route a la fâcheuse habitude de se balader dans mon corps. Après avoir squatté mon péritoine, le voilà qui a trouvé un nouveau nid douillet dans mes os, particulièrement mes humérus et mes têtes fémorales. Vilain garnement !

Me voilà donc avec un nouveau traitement, une thérapie ciblée et une hormonothérapie par injection (une piqûre dans chaque fesse toutes les quatre semaines, et ça pique!). Six chances sur dix pour que ça « stabilise » les métastases. J’ai bien compris que le but c’est pas de les faire disparaître, juste d’empêcher qu’elles se propagent. Chouette perspective !

Tout ça pour dire quoi, déjà ? Pour dire à mes collègues du D.U. Que je ne pourrai pas aller avec elles en Normandie. Que je le regrette sincèrement. Que je ne m’en sens pas la force ni le courage. Mais que je ne leur ferai pas faux bond. Que je ne les abandonne pas. Que je tiendrai mon rôle lors de la soutenance. Qu’il ne faut pas qu’elles m’en veuillent.

Sandrine, quand tu me téléphoneras cet après-midi pour mettre les choses au point pour la soutenance, j’espère que tu auras lu cet article et que tu auras compris et que nous pourrons travailler sereinement.

Allez tout le monde, je vous laisse !

Bonne journée et surtout portez-vous bien !

L’empereur de toutes les maladies

Ça y est, il est arrivé ce jour tant redouté, ce jour où la maladie se rappelle à ton bon souvenir.

Ça commence doucement. Tu as rendez-vous avec ton oncologue à 9h00. Il a une heure de retard, comme d’habitude, mais tu te dis que c’est pas grave. De toute façon, la consultation ne va pas durer très longtemps. Comme d’habitude, il va te dire que ton PET scan est normal, il va renouveler tes ordonnances et te donner rendez-vous dans 3 mois.

Oui mais voilà, aujourd’hui, la première chose qu’il te dit c’est « le PET scan est moins bon que les fois précédentes ». Et là, ben …. tu attends la suite.

Tu savais que ce jour arriverait . Tu as un cancer métastatique. Tu n’en guériras pas. Les médicaments, tant qu’ils sont efficaces, contiennent la maladie mais ne l’éradiquent pas. Et c’est une maligne cette maladie. Tu dresses des barrières devant elle mais, comme elle est très intelligente et qu’elle te connaît bien, elle trouve des moyens de passer et de continuer son œuvre de destruction. Après tout, elle fait partie de toi, ce sont tes propres cellules qui sont au travail.

Donc, visiblement, attaque au niveau osseux intra-médullaire. Et en effet on voit des petites taches sur les humérus, les clavicules, les têtes fémorales, et j’en oublie sans doute. Y a pas à dire, le PET scan c’est formidable. Le sucre s’est bien fixé là où les anomalies se trouvaient.

Résultat : on change de chimiothérapie et d’hormonothérapie. On repasse un PET scan début avril et on se revoit mi-avril.

Le problème est que, avec ma stomie et mes relations désastreuses avec certaines chimiothérapies, je ne peux pas bénéficier de certains traitements. Donc on navigue un peu à vue.

Mais bon, j’ai survécu presque 4 ans déjà et c’est bien. J’ai profité de chaque moment et je compte bien continuer. Après tout, je suis une guerrière. C’est l’occasion de me remotiver, de revoir mes priorités, de vivre, tout simplement.

Ah oui, pourquoi ce titre ? Tout simplement parce que c’est un livre formidable que je suis en train de lire. Écrit par Siddhartha Mukherjee, il retrace l’histoire du cancer et de ses traitements. Il se lit comme un roman. Je conseille à toutes celles et tous ceux qui sont intéressés de lire.

Histoire de ne pas finir sur une note trop pessimiste, voici une petite photo du Festival des lanternes de Gaillac que j’ai visité samedi dernier.

festival des lanternes Gaillac

Allez, je vous laisse. Surtout, faites attention à vous !

À bientôt